L’Aube sera grandiose d’Anne-Laure Bondoux, obtient lePrix Vendredi
Une épopée familiale haletante qui lie trois générations dans une cabane au bord d’un lac… Le roman a reçu lundi 9 octobre 2017 le Prix Vendredi.
La promesse de nuits sans sommeil
Tenir dans les mains le dernier roman d’Anne-Laure Bondoux est la promesse réjouissante de petites nuits à venir. Conteuse hors pair, l’auteure happe son lecteur, l’installe dans sa musique lexicale et ne le lâche plus. Lui se laisse volontiers faire, car à la clef, il devine qu’il va rencontrer des personnages romanesques complexes et attachants, rentrer dans leur vie intime et questionner sa propre existence à travers la leur. L’Aube sera grandiose ne déroge pas à la règle car il est question d’héritage familial, transmis par une mère à sa fille, au cours d’une seule nuit. Elles non plus ne vont pas dormir…
Une grand-mère libre et audacieuse
Comment oublier le souffle de l’aventure avec l’intrépide Malva de La Princetta et le capitaine, la traversée de l’ouest Américain avec la flamboyante Bella Rossa dans Pépites ou encore l’exil à travers le Caucase avec courageuse Gloria du Temps des miracles ? Rose-Aimée de L’Aube sera grandiose, mère de Titania et grand-mère de Nine, 16 ans, fait partie de cette galerie de femmes libres que l’auteure affectionne et qui montrent le chemin de l’émancipation. « Elle s’est imposée comme le pivot de la famille et du roman » (1), explique Anne-Laure Bondoux. Comme Nine qui, le jour précédent, ignorait son existence, le lecteur découvre cette femme hors du commun dont le caractère, la fantaisie, la force peuvent peser sur ses descendants, les porter ou les deux.
Une cabane intime et cachée
Absente physiquement de la cabane où Titania a décidé de passer la nuit avec sa fille, Rose-Aimée irradie par son omniprésence palpable. C’est dans ce même endroit qu’elle a dévoilé, il y a presque trente ans, son lourd secret à sa fille Titania et ses deux fils Octo et Orion. Le refuge isolé – et sans réseau au grand dam de Nine – s’avère propice aux confidences et aux révélations. « Elle fait penser à un ventre, à un giron maternel », commente l’auteure. Ce lieu intime fait aussi partie à part entière de l’histoire familiale de l’adolescente dont elle ignore encore tout. La transmission commence dès qu’elle y pénètre. « Quelque chose la dépasse. » (2)
Un polar dans le roman
Le huis clos impose d’emblée une intensité dramatique que le talent de Titania, écrivain de polars dans la vie et narratrice des flash-back dans le roman, va alimenter par un suspense haletant. Les ingrédients qui composent son enfance s’y prêtent parfaitement : séparation, sacrifice, fuite, argent, violence, drame… Il empêchera sa fille Nine de s’endormir malgré la fatigue et, par la même occasion, tiendra en haleine le lecteur. Car à l’unité de lieu, s’ajoute une unité de temps… « Au matin, tout est dit, les secrets sont dévoilés, et plus rien n’est comme la veille. »
Le poids de l’héritage familial
Comment renaît-on après une nuit de révélations ? Le roman pose la question du poids de l’héritage familial, qui se répète d’une génération à l’autre, sur la construction de soi. Comment accepter, comprendre, digérer les multiples non-dits et les mensonges ? Le chemin qu’a pris Titania est bien différent de celui de ses frères. Quel sera celui de Nine maintenant qu’elle a récupéré tous les morceaux du puzzle de sa propre histoire ? « Pour ce roman, je me posais des questions autour de l’ambition et des limites que nous impose l’histoire familiale dont nous sommes issus », explique Anne-Laure Bondoux. Le roman laisse en suspens les réponses à l’aube d’un nouveau jour. Pour Nine, il y a un avant cette nuit sans sommeil, et un après qu’elle devra reconstruire.
Une double lecture ado-adulte
Comme toujours, Anne-Laure Bondoux s’affranchit de la frontière adulte/jeunesse et va même plus loin. Elle juxtapose l’époque de l’économie d’attention imposée par internet et l’hyperconnexion avec celle du walkman et des cassettes. En racontant son enfance, celles des années 1970 et des années 1980, Titania permet aux lecteurs de remonter le temps dans un passé proche pour les adultes mais non connecté – donc paléolithique pour les ados – et de mesurer combien le quotidien en a été métamorphosé. « Nous sommes les fruits d’une histoire familiale mais aussi ceux d’une époque », rappelle Anne-Laure Bondoux. Cette dimension vintage, réjouissante pour les plus grands et improbable pour les ados, permet de rythmer le récit par des moments drôles et délicieux.
(1) Les citations d’Anne-Laure Bondoux sont extraites de l’interview dans le dossier de presse.
(2) Extrait du chapitre 2 de L’Aube sera grandiose
PS : Le roman est lauréat du premier Prix Vendredi décerné lundi 9 octobre 2017.
Bonjour
Je voudrais faire part de mon sentiment pour ce livre que j’ai adoré. Les flashs dans le passé sont si réels que l’on a l’impression d’y être (comme dans tout les bons livres)
J’ai aussi aimé le fait du suspens dès le début qui oblige à s’accrocher au livre jusqu’à en faire des nuits blanches …
Pour l’instant je lis un autre livre de Anne Laure Bondoux qui a pour titre « Tant que nous sommes vivants ». Je n’ai lu que 30 pages et je suis déjà à fond !
Merci d’avoir lu ce message
Bonjour Léonie
Merci beaucoup pour votre beau commentaire. Quand vous aurez fini Tant que nous sommes vivants, je vous invite à lire Les larmes de l’assassin d’Anne-Laure Bondoux paru en 2003. Ce roman m’a ouvert les portes de la littérature jeunesse…