Les Derniers branleurs de Vincent Mondiot lauréat du prix Vendredi

Les Derniers branleurs de Vincent Mondiot lauréat du prix Vendredi

Le jury a tranché et a choisi de récompenser une langue acérée, une écriture irrévérencieuse et une construction audacieuse.

Cette année, il a fallu patienter près d’un mois pour connaître le lauréat. Une aubaine pour ceux qui n’avaient pas lu toute la sélection en temps et en heure et qui ont pu ainsi rattraper leur retard. L’occasion aussi de découvrir de nouveaux auteurs. En ce qui me concerne, Vincent Mondiot, lauréat du prix Vendredi décerné ce mardi 1er décembre, en faisait partie.

Lire pour la première fois cet écrivain s’est avéré pour moi une expérience électrique, rock and roll ou punk, à chacun ses références. Sur la forme comme sur le fond. Son roman prouve une nouvelle fois que « la littérature jeunesse d’aujourd’hui, incroyablement dynamique, ose et surprend », comme l’explique en préambule le prix Vendredi.

« Il y a 150 fois le mot « putain » »

Les derniers des branleurs sortent de la zone académique et c’est assez savoureux à condition de lâcher prise dès le premier « putain » rencontré. « J’ai compté avec mon éditeur, s’amuse Vincent Mondiot joint par téléphone. Il y a 150 fois le mot « putain ». C’est un parti pris. Je ne voulais pas être joli, ni élégant. » Le défi était risqué mais il est réussi car cette écriture vivante, acérée et « chiadée », avec un goût évident pour le dialogue, sert admirablement le propos : la photographie d’une adolescence sans filtre mise en scène dans une comédie irrévérencieuse et décoiffant.

Gaspard, Chloé et Minh Tuan sont en terminale. Ils font partie de la dernière cohorte à passer l’ancien bac. Sur le plan de table, ils occupent le dernier rang de la classe avec des notes en chute libre. En dehors des cours, ils trompent leur ennui sans penser plus loin que le lendemain. Ils le font avec ce qu’ils sont et avec ce qu’ils ont : mangas, pornos, joints, ragots… Mais toujours ensemble.

Car en amitié, ils sont exemplaires. Seule Tina, Congolaise, mineure isolée et élève brillante, va réussir à percer leur bulle et par la même occasion trouver une place. Cette brèche va un peu les décentrer et leur donner une idée de « branleurs » pour finir l’année en beauté : tricher pour obtenir le bac avec mention.

« Ils ne sont pas méchants »

« Je me suis inspiré du chapitre lycéen de ma vie et de mon propre lycée, avoue Vincent Mondiot. Chacun de mes personnages vit des drames familiaux pas très rigolos. » Mais réalistes. Tina, c’est autre chose. « Son parcours, je l’ai rencontré en tant que professeur de français langue étrangère. Je trouvais intéressant de confronter sa réalité à celle des trois autres. »

Actes sud junior, 464 pages.
Dès 15 ans.

Le décalage est parfois saisissant. Tout paraît nul aux trois amis alors que Tina s’extasie devant un skate ou se délecte en laissant fondre un morceau de roquefort. Mais l’alchimie fonctionne. « Même s’ils se montrent parfois cruels, au fond, ils ne sont pas méchants. » Juste irritants, parfois comiques, surtout authentiques. Leur désœuvrement dépasse leur professeure principale, impuissante. En même temps, « se projeter dans une société anxiogène, c’est dur », reconnaît l’écrivain.

Le récit dure une année scolaire, rythmée par des conversions caustiques qui surfent sur la vague de la vulgarité sans boire la tasse ; des notes désopilantes dans la marge, comme dans des copies de classe : « C’est expérimental et du bonus. Chaque lecteur en fait ce qu’il veut. » ; Et des moments plus intimes qui dévoilent des fragilités sous chacune des carapaces.

Très vite le lecteur s’attache à ces anti-héros plus proches des Beaux gosses que des ados de la Fureur de vivre. Contre toute attente, je me suis retrouvée malgré moi à ne plus vouloir les lâcher.

Les mots du jury pour le lauréat Vincent Mondiot

« Vincent Mondiot, qui avait reçu une mention du prix Vendredi en 2018 pour son premier roman Nightwork, vient confirmer la singularité de son talent avec Les Derniers des Branleurs, texte à la construction magistrale.

D’une forme inventive, et d’une écriture précise et insolente, le roman ne cesse de surprendre. Les anti-héros, traités avec une rare justesse tant dans leurs caractères que dans leur langage, se révèlent au long d’un récit qu’on ne lâche pas avant de l’avoir terminé.

Les refus et les désenchantements de l’adolescence sont traités sans complaisance, avec un humour qui ne se dément pas. »

Deux mentions spéciales ont été attribuées à Cathy Ytak pour Sans armure (Talents Hauts) et Éric Pessan pour Tenir debout dans la nuit (L’école des loisirs).

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