Âge tendre, Clémentine Beauvais, Sarbacane

Âge tendre, Clémentine Beauvais, Sarbacane

Dans cette comédie mélancolique écrite sous la forme d’un journal de stage, il est beaucoup question de mémoire mais aussi de Françoise Hardy…

Depuis Songe à la douceur, entièrement écrit en vers libres, Clémentine Beauvais a dévoilé son goût pour les recherches stylistiques afin de trouver la forme qui servira le mieux son histoire.

Un nouveau roman en mode journal de stage ? Why not… L’idée audacieuse fait même sourire au début, puis elle effraie un peu. Lire des mots-clefs qui sonnent creux sur un ton administratif pendant 378 pages, ça risque de lasser, non ? Heureusement, il y a quelque chose entre les premières lignes de Valentin Lemonnier, stagiaire de 15 ans, qui rassure très vite sur la suite des événements.

PODCAST. Ecouter également le quatrième épisode de la série Entre les lignes avec Clémentine Beauvais.

Un futur proche et alternatif

Difficile de dater le roman. Disons qu’il se situe dans un futur proche et alternatif. La présidente de la République a décidé que tous les élèves, après leur troisième, devaient effectuer un Service civique obligatoire (SCO pour les intimes) avant de rentrer en lycée.

Cette année-là, Valentin Lemonnier fait partie de la cohorte et il apprécie moyennement l’idée de devoir quitter le cocon familial pendant dix mois. Lui qui avait mis dans ses préférences une région facilement accessible du Tarn (il habite Albi) et une structure culturelle, il se retrouve à Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) dans une sorte d’EHPAD spécialisé dans la démence. Ah ! Les joies de l’administration numérisée…

Un stage inoubliable

Le garçon, désarçonné et muni d’un guide de survie au Service civique obligatoire, se retrouve au milieu ses pairs (5 en tout) dans une maisonnette boulonnaise et commence à rédiger son journal de stage, histoire de ne rien oublier de cette année… inoubliable à plus d’un titre :

  • Sa plongée dans les années 1960-1970 (en version dorée puisque les sujets fâcheux sont volontairement occultés) via la section B de l’unité Mnémosyne dans laquelle il effectue son stage. Elle accueille des personnes atteintes de démence qui avaient une vingtaine d’années dans les années yé-yé.
  • Sa rencontre discographique avec Françoise Hardy grâce à sa première mission qui consistait à envoyer à une résidente un courrier lui disant que, non, Françoise Hardy ne viendra pas chanter (trop cruel pour Valentin… Mission en partie ratée).
  • Son amitié avec Sola, sa tutrice et l’histoire d’amour de cette dernière qui le bouleverse.
  • Sa découverte de la Côte d’Opale… très belle avec ses mouettes et ses falaises blanches britanniques à l’horizon.
  • Sa relation avec les résidents ultra-attachants à la mémoire chancelante qui ont chacun leur façon de perdre la tête.
  • Sa métamorphose : au bout d’un an, Valentin n’écrit plus carré.

Un humour teinté de mélancolie

Le journal de stage que lit le lecteur est donc terminé et agrémenté de notes rétrospectives. Elles donnent une dimension réflexive… et humoristique aussi car Valentin a une façon bien à lui de relater les événements en temps 2, comme en temps 1, mais entre-temps, il a arrondi son écriture.

382 pages, 17 €.
392 pages, 17 €.

Entre les pages, la mémoire est omniprésente à travers trois histoires qui s’entremêlent. Celle de Valentin, celle de Sola et celles des résidents et leurs soignants : trois pertes à des degrés divers et trois deuils plus ou moins impossibles.

Et cette question centrale : comment sauvegarder les souvenirs ? Les oublier terrifie… Le sujet est plutôt grave et sérieux mais il est traité avec le talent de l’autrice, sa fantaisie et son humour teinté, ici, de mélancolie. Le tout en fait une lecture mémorable.

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