Je suis la méduse, Béatrice Fontanel et Alexandra Huard, Les Fourmis rouges
Cet album donne la parole à une magnifique méduse sans pétrifier le lecteur dans un monologue qui mêle subtilement poésie et pédagogie.
Comment une méduse peut-elle devenir une héroïne d’un album pour enfant ? La réponse est dans ce livre fluorescent qui provoque des sentiments contradictoires. Car la narratrice est bel et bien une espèce cnidaire, capable de vider le bord de mer de ses nageurs à la moindre apparition et de provoquer des brûlures plus ou moins allergisantes au moindre contact. Et pourtant…
Cette jeune méduse ondule avec sensualité et délectation dans les eaux profondes où elle est née. Composée essentiellement d’eau, elle avoue ne pas avoir assez de volonté pour lutter contre les courants marins qui la poussent vers la côte. En effleurant une petite fille au bord du rivage, elle ne cherche pas à lui faire du mal. Pourtant la brûlure est bien là et la nouvelle se répand très vite chez les baigneurs. Pour éviter d’autres pleurs, le père sort, avec une éprouvette, la responsable et la laisse sur la plage. Échouée sur le sable, la créature, si gracieuse dans l’eau, perd tous ses charmes. Sur le point de trépasser, la méduse est sauvée in extremis par sa victime…
En donnant la parole à une jeune méduse, Béatrice Fontanel réhabilite l’espèce et Alexandra Huard la sublime dans une danse sensuelle rehaussée d’une cinquième couleur fluo que l’on retrouve sur le poignet de la jeune fille, tel un lien indélébile. Le texte mêle, avec subtilité, poésie et pédagogie. Implicitement, l’histoire renvoie à une question essentielle : la cohabitation entre l’homme et la nature. Entre les lignes et au milieu des animaux marins, se dessine l’irrespect symbolisé par des déchets. En remettant dans l’eau la méduse, la petite fille sait, inconsciemment, que chacun a sa place même si l’équilibre est fragile. Elle le prouve devenue adulte. Un conte écologique à méditer.
No Comment