La vie au bout des doigts d’Orianne Charpentier
Le parcours de Guenièvre, adolescente solitaire et mystérieuse, qui bascule dans le monde adulte avec en toile de fond la Belle époque et la Grande Guerre. Une surprise et un coup de cœur !
Guenièvre, orpheline et mal dans sa peau, supporte comme elle peut l’internat où certains lui prêtent des dons maléfiques. Seule Pauline, une jeune fille qui refuse l’avenir que lui réserve son père, s’intéresse à elle. Cette amitié va la mener à Paris où elle découvre les codes de la mode de la Belle époque, les bouleversements et les grands chantiers aussi. Puis, elle rejoint sa grand-mère à la campagne, vieille femme mystérieuse et respectée, dans un manoir délabré. Là, auprès de Perpétue, une femme dynamique et bienveillante, elle se confronte à ses origines et au secret de famille qui pèse sur ses épaules. C’est alors qu’éclate la guerre…
Surprise. J’ai adoré ce livre qui m’a d’abord surprise. Jusqu’alors, les romans d’Orianne Charpentier (Mauvaise graine et Après la vague) étaient plutôt intimistes, pas très longs, toujours sensibles et justes sur l’adolescence. Là, le changement de genre est radical. Pourquoi ? Elle l’explique dans cette courte interview. Orianne Charpentier nous embarque dans une aventure romanesque digne des romans du XIXe. Une fresque aux multiples personnages et aux références historiques, culturelles et sociales subtilement présentes pour donner à ressentir sans faire dans la didactique. Quant à l’écriture, elle est élégante et sensible, comme toujours chez cette auteure, mais aussi vivante grâce aux dialogues.
Guenièvre. Elle est une héroïne malgré elle. Candide, naïve, grosse… l’adolescente, rejetée de toute part, ne possède guère les critères « héroïques ». Elle a aussi beaucoup de nœuds à dénouer pour devenir elle-même : la folie de sa mère, la mort prématurée de ses parents, le silence de sa grand-mère, le regard effrayé des autres qui lui prêtent un don dont elle ignore tout… Cette quête de soi passe par la confrontation à ses origines. Le lecteur assiste à sa lente métamorphose, aussi bien physique que psychologique (on retrouve là tout le savoir-faire d’Orianne Charpentier lorsqu’il s’agit de peindre l’adolescence, même à une époque révolue) jusqu’à ce qu’elle devienne une adulte qui s’accepte, prête à affronter le monde tel qu’il est.
Femmes. Contrairement aux romans classiques du XIXe, le héros est une héroïne et les personnages secondaires sont majoritairement féminins. Pauline, Madame Davout, Perpétue, Madame Archambault… Toutes ces femmes vont devoir « se débrouiller » pendant la guerre et elles le feront plutôt très bien prouvant qu’elles sont des êtres humains à part entière et non « inférieures ». Cent ans plus tard, on continue à se battre pour l’égalité homme-femme…
Belle époque. Cette période est fascinante et Orianne Charpentier arrive à travers ses personnages à nous la décrire « humainement ». Notamment, à travers les analyses « visionnaires » de Perpétue mais aussi les leçons de mode de Madame Davout. Surtout, les résonances avec le début du XXIe sont nombreuses et devront sans aucun doute interpeller les lecteurs d’aujourd’hui.
Grande Guerre. Orianne Charpentier parle de miroir révélateur. À l’image de Madame Davout qui va retirer sa carapace de femme mondaine et hautaine pour se dévoiler en femme aimante et généreuse.
Humour et amour. Des dialogues pertinents et savoureux, des analyses fines et pleines de bon sens… il y a des moments drôles dans ce roman malgré cette période sombre. Et puis il y a aussi les premiers émois, le sentiment amoureux, la crainte de perdre l’être aimé… du romanesque quoi !
Couverture. J’ai lu ce roman sur une liseuse (les épreuves n’étaient pas encore disponibles). Lorsque j’ai reçu le livre, j’ai été déçue par la couverture. Je sais, c’est très subjectif. Mais voilà, sa sobriété m’a paru fade et en décalage comparé aux personnages hauts en couleur.
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