Deux Fleurs en hiver, deux regards sur la vieillesse et une belle rencontre
L’une est résidente à l’Ehpad Bel Air, l’autre y fait son stage de terminale pro. Dans Deux Fleurs en hiver de Delphine Pessin, Violette et Capucine se racontent et se rencontrent
Un roman adolescent qui se passe dans une maison de retraite, c’est étrange. Dans Deux Fleurs en hiver, de Delphine Pessin paru chez Didier jeunesse le 4 mars, beaucoup de personnages sont des vieux. Pas des « séniors », des « anciens », des « pensionnaires », mais des vieux, comme préfère le dire Capucine.
La jeune fille, en terminale pro, arbore une perruque bleue électrique le premier jour de son stage d’aide-soignante à l’Ehpad Bel Air. Elle n’est pas encore sûre de son choix professionnel mais assume d’être là.
Violette, nouvelle résidente, ne supporte pas de voir son univers se rétrécir et de quitter sa maison et son chat pour une chambre minuscule. Mais les perruques de Capucine, qui changent de couleur en fonction de l’humeur de la jeune fille, vont avoir raison de son désespoir.
« L’histoire d’une vieille personne »
« C’est le personnage de Violette qui est né en premier, raconte l’autrice Delphine Pessin. J’avais envie de raconter l’histoire d’une vieille personne et de faire cohabiter sa voix intérieure avec le point de vue d’une jeune fille. »
Entre les deux femmes, aux deux extrémités de la vie, se tisse un lien qui aboutit à des confidences… Au fil des chapitres, leurs nœuds se dévoilent et chacune aide l’autre à le dénouer plus ou moins consciemment. L’amitié n’a pas d’âge. Celle qui naît entre les deux protagonistes, une jeune fille qui n’a pas encore 20 ans et une vieille dame qui a dépassé les 80 ans, le prouve.
En arrière-plan de cette belle rencontre, la vieillesse, fragile, délicate et omniprésente, est décrite avec justesse et réalisme : les pensées sombres, les sauts d’humeur, les corps frêles, les chutes dissimulées mais aussi les gâteaux périmés que Capucine va apprendre à glisser dans sa poche, les petites manies, les regards malicieux… Le roman relate aussi un climat social tendu, lié aux conditions de travail dégradées du personnel. « Je ne pouvais pas ne pas évoquer cette réalité », remarque Delphine Pessin.
Une autrice à suivre
Deux Fleurs en hiver est le cinquième roman de Delphine Pessin, 46 ans, professeure de français dans la région Centre, mais c’est le premier que je lis. L’autrice a toujours écrit pour elle, mais a mis du temps avant de se lancer pour les autres. C’est aussi une grande lectrice de romans de littérature jeunesse qu’elle partage avec ses élèves.
Son premier roman ado La Carotte et le bâton (Talents Hauts), paru en 2017, a été remarqué et sélectionné dans de nombreux prix. Mais c’est surtout le concours Émergences de la charte des auteurs qui l’a propulsé devant une douzaine d’éditeurs en 2018. Un coup de pouce qui l’autorise à continuer à écrire pour les autres. Une autrice à suivre de près donc…
Cet article est paru dans dimanche Ouest-France le 12 avril 2020
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