L’arrivée des capybaras, Alfredo Soderguit, Didier jeunesse
Cette fable animalière propose aux jeunes enfants de réfléchir sur le décalage entre le texte et l’image où se glisse une autre vérité
Mais qui sont les capybaras ? D’après le dictionnaire, il s’agit de mammifères semi-aquatiques d’Amérique du Sud, les plus grands des rongeurs, appelés aussi cochons d’eau. La couverture dévoile d’emblée leur physionomie avec précision, tout en leur attribuant un capital sympathie non négligeable et en contradiction avec la première idée que l’on peut se faire de gros rongeurs. Cette famille de capybaras semble inoffensive et en même temps un peu perdue…
L’auteur illustrateur uruguayen Alfredo Soderguit délaisse les rongeurs (mais c’est pour mieux les introduire dans le livre ensuite) pour s’intéresser davantage au lieu, un endroit tranquille mais pas si paisible que cela si l’on observe bien. Et le sens des mots peut s’avérer cruel lorsqu’on les recale avec certaines images…
Pas de ça chez nous !
Puis arrivent les protagonistes de cet album très élégant, grâce à une gamme chromatique restreinte (brun, noir, rouille). L’effroi qu’ils jettent est visible dans les regards des poules, moins des poussins. Dans la basse-cour, une réunion au sommet s’improvise et la conclusion est sans appel. Pas de ça chez nous ! Les règles imposées par les poules sont drastiques et très autoritaires. Quant aux intrus, « poilus, mouillés et trop gros » dixit les poules, ils se montrent dociles (ce qui les rend encore plus attachants).
Est-ce la curiosité qui l’emporte ? Ou bien s’agit-il d’ados qui transgressent les règles ? Toujours est-il que ce poussin et ce jeune capybara ont décidé de passer outre le règlement. L’apprivoisement ne se fait pas sans quelques craintes mais une fois franchies, le poussin semble à son aise sur le dos de son nouveau pote impassible. La mère poule ne le voit pas sous cet angle-là et interdit fissa à son poussin de s’approcher de ces sauvages. Euh… C’est qui les sauvages ?
Retournement de situation
Les images en disent bien plus que le texte très sobre, voire inexistant, ce qui laisse aux jeunes enfants le loisir de faire leur propre interprétation. Les capybaras vont se montrer effectivement très dangereux… mais pour une noble raison (là ils deviennent carrément des héros !) et le retournement de situation est à la hauteur du rejet.
L’amitié qui en découle se traduit par des envies de liberté où les poules, qui ne feront pas ce qu’elles ont à faire, ne finiront pas dans l’assiette des fermiers. Ni les autres dans celles des chasseurs. Reste à convaincre les moutons (ça sera plus facile avec l’agneau;-)!).
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