En 4 temps, Bernadette Gervais, Albin Michel Jeunesse
Un album élégant et graphique qui invite à la contemplation et l’émerveillement avec une pointe d’humour qui s’étiiiire
En cette période de confinement, qui dure maintenant depuis quarante-six jours, une évidence s’impose : notre rapport au temps est bousculé. Pas dans le sens « pressé », mais plutôt en mode déstabilisant.
Dans ce contexte, l’album graphique de Bernadette Gervais, paru chez Albin Michel Jeunesse en janvier 2020, joue l’apaisement à un rythme régulier, En 4 temps, histoire de retrouver un semblant de repères.
Dès la couverture le ton est donné : un graphisme épuré, une géométrie parfaite (quatre rectangles aux dimensions identiques), une élégance raffinée. C’est un beau livre, jusqu’au toucher. Mais pas de panique, il reste accessible aux petites mains. Elles sauront se montrer respectueuses d’un si bel objet, à la fois simple dans sa forme et complexe sur le fond. Car la notion de temps, dont il est question, s’apprivoise avec le temps justement.
Une durée plus ou moins longue
Dès les premières pages, un mode d’emploi, qui ne dit pas son nom, explique le sens de lecture et invite à revenir observer le pissenlit de la couverture à quatre moments de son existence. Commence ensuite une série d’instants et de mouvements, d’une durée plus ou moins longue, décomposés en quatre temps. Des secondes, des minutes, des heures, une journée… Combien durent ces moments ? Quelques indices permettent de se faire une idée, aux enfants de les repérer.
C’est d’abord l’escargot qui pointe le bout de ses antennes via la case en haut à gauche dans la page de droite. Sur la page de gauche, un titre suivi d’une phrase de deux mots présentée en forme de quatrain, histoire de garder le rythme, commente les images. Dans le titre, L’Escargot 1, quelque chose nous laisse entendre que l’on n’en a pas fini avec ce mollusque…
Poétique, esthétique, ludique
Sa lenteur suggérée ne supporte pas la comparaison avec Le Chat 1 sorti de la page à peine entré. Le Chat 2 aura même le temps de revenir sur ses pas alors qu’il faudra attendre L’Escargot 4 pour voir enfin le mollusque traverser la page…
Il se dégage de cet album rythmé et élaboré une dimension poétique, qui n’est pas sans rappeler l’esprit des haïkus ; une dimension esthétique, qui rappelle Contes au carré, un autre album graphique très réussi ; une dimension ludique qui met le temps au centre du jeu ; et une dimension comique qui fait l’éloge de la lenteur.
Il se termine par une maxime en quatre phrases sur la quatrième de couverture qui rend hommage au livre et c’est joliment dit. Un bel objet, vraiment, très précieux en ces temps de confinement.
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